Les spécialistes des illusions d’optique le disent : il n’est pas approprié de parler d’illusion puisque nous ne percevons jamais le réel ! Notre cerveau ne fait qu’appliquer les mêmes règles lorsque nous sommes satisfaits ou trompés par notre perception. Les illusions peuvent donc être considérées comme des phénomènes très informatifs pour les scientifiques qui essaient de comprendre la perception : elles nous apportent des informations très précieuses sur les inférences inconscientes utilisées par notre perception pour décoder les informations sensorielles.
Alors pourquoi ces erreurs magistrales de notre perception ?
De nombreuses illusions persistent parce qu’elles répondent à notre besoin le plus fréquent. En voici quelques exemples :
L’illusion des rails de chemin de fer (ou illusion de Ponzo):
Nous percevons l’objet situé en haut de l’image plus grand parce que nous interprétons dans cette image qu’il est plus éloigné, car les lignes de perspectives sont traduites comme de la profondeur. De ce fait notre système perceptif tente de corriger cet effet en grandissant les objets qui l’éloignent afin de compenser leur réduction de taille (principe de la constance de la taille). C’est typiquement ce qu’il se passe lorsque vous regardez votre main près du visage et l’éloignez devant vous : la main semble de taille constante alors que sa taille sur la rétine varie considérablement ! Sur les rails de chemin de fer, le mécanisme de compensation de la taille ne pose pas de problème tant qu’il n’y a qu’un seul objet. Et Il ne pose pas de problème non plus dans la vraie vie (voir photo ci-dessous) puisqu’il nous permet de compenser l’effet de l’éloignement. Mais l’impression d’illusion apparaît lorsque deux objets de même taille se déplacent en sens inverse et que leurs tailles relatives semblent très variables.
Les contours illusoires (ou triangle de Kanizsa) :
Nous percevons ici un objet qui n’existe pas mais dont les contours sont esquissés par les limites d’autres objets qui apparaissent en arrière.
Cette illusion classique révèle que notre système perceptif est capable d’interpoler les contours afin de construire une forme. Est-ce une erreur ou un atout ? Il s’agit dans la vraie vie d’un atout qui a permis la survie de notre espèce ! Imaginez que nous ne sachions pas reconnaître un prédateur dès que sa forme entière est obstruée par un arbre…
Il est bien évidemment très important de savoir reconnaître les formes qui sont partiellement cachées surtout lorsqu’elles peuvent être aussi dangereuses. La contre-partie en est que nous avons parfois tendance à percevoir des contours illusions et créer des objets impossibles comme le triangle de Kanisza. C’est aussi cette tendance à fabriquer un tout à partir de deux parties incongrues qui nous donne le sourire à la vision de ce zèbre à deux têtes : notre système perceptif nous suggère qu’il s’agit d’un tout alors que nous savons bien que cela est impossible.